LA VICTOIRE DE TSAI ING-WEN A TAIWAN EST UNE GIFLE POUR PEKIN

« La victoire de Tsai Ing-wen est une gifle pour Pékin car les Taïwanais n'ont pas cédé aux intimidations », a déclaré l'analyste politique Hung Chin-fu de l'université nationale Cheng Kung à Taïwan.

La victoire de Tsai Ing-wen, la présidente sortante de Taïwan est un camouflet pour Pékin car la Chine soutenait clairement son opposant, le candidat du Kuomintang, Han Kuo-yu, qui faisait course en tête il y a un an.

Mais c’était avant les événements de Hong Kong qui ont fait prendre conscience aux Taïwanais des risques d’un rapprochement avec Pékin. Tsai Ing-wen a fait campagne contre l'autoritarisme de Pékin.

Victoire de Tsai Ing-Wen

Avec 57,1 % des voix, la présidente sortante dépasse sa performance de 2016, réunissant 8,1 millions de votes, un score inégalé depuis que des élections libres se tiennent à Taïwan, île de quelque 23 millions d'habitants.

Avec un taux de participation record de 74,9 %, Mme Tsai, âgée de 63 ans, a remporté une victoire écrasante sur le candidat du Kouomintang (KMT), le populiste Han Kuo-yu, maire de Kaohsiung, la grande ville du sud de l’île, crédité de 38,6 % des suffrages.

Tsai Ing-wen a aussi permis à son parti, né de la lutte contre la dictature du parti unique imposée par Tchang Kaï-chek, de garder sa majorité au Parlement, qui n’a qu’une Chambre, au terme des législatives qui se tenaient en même temps que la présidentielle. Le Parti démocratique progressiste DPP a obtenu 61 sièges sur les 113 du Yuan législatif . Le KMT gagne trois sièges, à 38. Autre fait marquant des législatives : l’émergence comme troisième force de l’Assemblée, avec certes seulement cinq sièges, du tout nouveau parti créé l’été 2019 par l’actuel maire de Taipei, Ko Wen-je, le Taiwan People’s Party (TPP).

Réaction lapidaire et mise en garde de la Chine

Les Chinois ont appris le résultat de l’élection présidentielle à Taïwan par un simple paragraphe annonçant la victoire de la « dirigeante » sortante, Tsai Ing-wen. Sous cette dépêche lapidaire, les commentaires sont révélateurs : plusieurs internautes demandent simplement « pourquoi ? ».

La réponse est embarrassante pour le pouvoir chinois et ils ne la liront pas dans la presse d’État, car officiellement en Chine, Taïwan, qui a pourtant toutes les caractéristiques d’un État souverain, est toujours une province renégate, qui doit être reprise par la force s’il le faut.

Non seulement c’est Taiwan en tant qu’identité taiwanaise, mais c’est aussi au point de vue idéologique, un régime démocratique qui s’oppose à une République populaire de Chine qui a longtemps mis en avant le fait que la réunification était inévitable, mais qui aujourd’hui voit ses arguments battus en brèche par les bons résultats de Tsai Ing-wen.

Au lendemain de l’élection, le ministère des Affaires étrangères chinois a publié un communiqué minimaliste affirmant qu'« quoi qu'il arrive (...) les faits ne changent pas: il n'y a qu'une seule Chine dans le monde et Taïwan fait partie de la Chine », a relevé Geng Shuang, un porte-parole du ministère des Affaires étrangères.

Par ailleurs, un commentaire a été publié par l’agence Chine nouvelle ce matin : Tsai n’y est pas appelée présidente, mais « dirigeante », ou « leader ». Et le texte accuse son parti d’avoir eu recours à des tactiques d’intimidation, de triche et achat de votes. L’éditorial se termine par une mise en garde : si la dirigeante Taïwanaise s’obstine sur la voie de l’indépendance, cela ne fera qu’accélérer sa « désillusion », comprendre, l’annexion de Taïwan. Pour le Global Times, quotidien au ton volontiers nationaliste, ces tensions sont « orchestrées » par Tsai Ing-wen et son parti « pour susciter la peur chez les Taïwanais à l'égard du continent ».

Cyberattaques, porte-avions -

Pékin « va-t-il continuer sa fermeté envers Tsai Ing-wen ou opter pour une approche plus souple (...) c'est la grande question », s'interroge Joshua Eisenman, analyste politique à l'Université Notre-Dame aux Etats-Unis.

Cyberattaques, investissements dans les médias de l'île pour obtenir une image plus favorable, voire démonstrations de force militaire ne sont pas à exclure, estime unspécialiste. Déjà fin décembre, Pékin a envoyé dans le détroit de Taïwan le « Shandong », son premier porte-avions de conception 100% chinoise.

« Taïwan a montré au monde à quel point nous aimons notre mode de vie libre et démocratique ainsi que notre nation », a lancé Mme Tsai devant la presse en annonçant sa victoire.

Washington a rapidement félicité la présidente réélue.« Sous son leadership, nous espérons que Taïwan continuera à servir de brillant exemple pour les pays qui se battent pour la démocratie », a déclaré le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo.

Garett pour Skyport pour DayNewsWorld