L'INVASION DES CRIQUETS DANS LA CORNE DE L'AFRIQUE OU UNE CRISE HUMANITAIRE  A VENIR

Vision apocalyptique : Des essaims de milliards de criquets pèlerins volent et détruisent tout sur leur passage. Depuis début janvier, ils ont déjà ravagé l'Éthiopie, la Somalie et le Kenya. L'essaim est désormais en train de sévir en Ouganda. Après l'Ethiopie, la Somalie et le Kenya, l'Ouganda a été à son tour envahi, dimanche 9 février, par des essaims de criquets pèlerins qui s'attaquent aux cultures. Ces dernières semaines, d'épais nuages d'insectes affamés ont fondu sur la Corne de l'Afrique, où l'Organisation de l'ONU pour l'agriculture et l'alimentation (FAO) a estimé qu'un seul de ces essaims couvrait une surface de 2 400 km2 – soit la superficie du Luxembourg.

Des dégâts inestimables à l'urgence nationale

Inoffensif lorsqu'il est solitaire, le criquet pèlerin se mue, lorsqu'un essaim se forme, en animal vorace, qui s'attaque à toute végétation verte. Selon la FAO, l'essaim de 2 400 km2 est formé de 200 milliards d'individus, qui consomment donc 400 000 tonnes de nourriture par jour.

Capables de parcourir 150 km par jour, ces nuages d'insectes suivent les vents dominants et se concentraient fin janvier dans le centre du Kenya et la moitié sud de l'Ethiopie. Le 10 février, de premiers insectes sont signalés en Ouganda et en Tanzanie. De nombreux essaims se trouvent également à la frontière entre l'Inde et le Pakistan. Deux pays, la Somalie et le Pakistan, ont décrété l'urgence nationale pour faire face à la situation.

Dans la Corne de l'Afrique, les agriculteurs avaient déjà moissonné leurs champs avant l'arrivée des essaims. Mais les éleveurs, qui venaient déjà de subir trois années de sécheresse, sont frappés de plein fouet par une invasion qui détruit les moyens de subsistance de leurs animaux. Si la menace des criquets n'a pas été jugulée d'ici le début de la prochaine saison de semis, aux alentours de mars, les agriculteurs pourraient voir leurs champs anéantis.

Selon la FAO, l'Ethiopie et la Somalie n'avaient pas vu d'essaims de criquets pèlerins d'une telle ampleur depuis 25 ans, et le Kenya n'avait pas eu à affronter de menace acridienne d'une telle force depuis 70 ans.

Comment expliquer cette invasion ?

Le criquet pèlerin, appelé « criquet du désert » en anglais, est originaire de la péninsule arabique, de l'Arabie saoudite, d'Oman et du Yémen. Une zone dont les côtes ont été frappées par deux cyclones

en 2018. Ces précipitations importantes ont favorisé la pousse de végétation et créé les conditions idéales pour la reproduction des insectes

Les Nations unies ont exhorté lundi la communauté internationale à prendre des mesures immédiates pour empêcher l'invasion de criquets pèlerins de se transformer en véritable catastrophe humanitaire dans la Corne de l'Afrique, où les pays de la région sont engagés dans une course contre la montre pour contrôler l'infestation.

Pour l'ONU une menace « vraiment grave »

Les criquets représentent une menace « vraiment grave » dans la Corne de l'Afrique, a déclaré à la presse au siège de l'ONU Mark Lowcock, secrétaire général adjoint aux Affaires humanitaires et coordinateur des secours d'urgence des Nations unies.

« Il y a 30 millions de personnes dans les pays touchés - l'Ethiopie, le Kenya et la Somalie - qui se trouvent déjà dans une situation d'insécurité alimentaire grave. A l'heure actuelle, 10 millions d'entre elles se trouvent en outre dans des zones touchées par les criquets », a-t-il indiqué.

« Si nous ne maîtrisons pas cela dans les deux, trois ou quatre prochaines semaines, nous allons avoir un problème vraiment, vraiment grave », a-t-il affirmé.

L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a récemment lancé un appel de fonds de 76 millions de dollars américains pour contrôler la propagation des criquets. Jusqu'à présent, à peine 20 millions de dollars ont été reçus, a déclaré M. Lowcock.

« Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre un nouveau choc majeur dans une région où il y a déjà tellement de souffrance, de vulnérabilité et de fragilité. C'est pourquoi nous devons agir rapidement », a-t-il indiqué.




Paul Emison pour DayNewsWorld