RATIFICATION DU CETA OU L' ACCORD CONTROVERSE

Le projet de loi sur la ratification du Ceta est voté, aujourd’hui, en France. Depuis son application provisoire, en 2017, ce traité de libre-échange commercial concentre les critiques. Il vient d'être ratifié par le parlement.

En raison des protestations de l’opposition, le vote sur projet de loi de ratification du Ceta a d'ailleurs été repoussé par les députés de l’Assemblée nationale et a fait l’objet d’un scrutin public, ce mardi 23 juillet.

Les points de tension concernent notamment les risques sanitaires, agricoles et environnementaux.

Un accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne

Il s’agit d’un accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne. Négocié depuis 2009, le texte a été signé en 2016 par le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, et le président du Conseil européen, Donald Tusk. Le Ceta (pour Comprehensive Economic and Trade Agreement) est appliqué de manière provisoire depuis 2017, uniquement sur son volet commercial. Son application totale nécessite la ratification de tous les États.


L'Accord économique et commercial global (AEGC) entre l'Union européenne et le Canada (CETA) dit de « nouvelle génération » réduit donc grandement les barrières tarifaires et non-tarifaires, mais traite également de nombreux aspects liés à l'exportation de biens et de services et à la mise en place d'un cadre d'investissement stable et favorable aux entreprises européennes et canadiennes.

Pourquoi le Canada ?

Le Canada est un partenaire commercial important de l'UE au 12ème rang des relations commerciales de l'Union européenne, tandis que l'UE est le deuxième partenaire commercial du Canada après les Etats-Unis. Le volume des échanges de biens entre les deux partenaires s'élève à près de 60 millIards d'euros par an. L'UE exporte principalement des machines, des équipements de transport et des produits chimiques vers le Canada. Les services commerciaux représentent quant à eux près de 26 milliards d'euros (en 2012), principalement des services de transports, de voyage et d'assurance.

De plus le Canada et l'UE ont une relation étroite en termes d'investissements, le Canada étant le quatrième investisseur étranger dans l'UE avec plus de 142 milliards d'euros (en 2012) tandis que l'UE est le deuxième investisseur étranger au Canada avec près de 260 milliards d'euros (en 2012).

Face à un un protectionnisme croissant ?

« En ces temps d’incertitude, avec un protectionnisme croissant à travers le monde, le Ceta souligne notre ferme engagement en faveur d’un commerce durable », avait justifié la commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, à l’issue du vote de l'accord au parlement européen. « Rien dans cet accord » n’affectera « la sûreté de la nourriture que nous mangeons ou des produits que nous achetons, ni n’entraînera la privatisation des services publics », avait-elle argué.

L' objectif principal est d’abaisser les barrières commerciales. Concrètement, les droits de douane seront supprimés sur 98 % des biens échangés. L’accord prévoit également d’élargir certains services à la concurrence et de renforcer la coopération des deux zones en matière réglementaire. Autre point important, la reconnaissance, par le Canada, de 145 indications géographiques protégées (IDP), dont 42 sont françaises. En majorité des fromages.

Les critiques du CETA

Dès sa mise en œuvre, le Ceta a concentré les critiques. Hier, Nicolas Hulot n' a-t-il pas demandé aux députés de ne pas ratifier un accord qui conforterait « l’un des pires élèves du G20 » en matière environnementale ?

Des doutes sur un « abaissement des normes sanitaires » ont également été exprimés. Contrairement à l’Union Européenne, le Canada autorise l’élevage de bœufs nourris aux antibiotiques ou à la farine animale.

Début juillet, à quelques jours du vote, le débat s'était cristallisé sur les farines animales, bannies en Europe après qu’elles eurent provoqué la crise de la « vache folle » ou de l’encéphalopathie spongiforme bovine .

Un trou dans la législation autorise en fait les éleveurs canadiens à nourrir leurs bœufs avec des farines produites à partir de ce qu’il reste de leurs congénères une fois découpés à l’abattoir – le sang, les poils, le gras – et à les envoyer sur le sol européen sans que le consommateur en soit informé. Les autorités canadiennes ont d'ailleurs reconnu le 19 juillet auprès d’Agra Presse que, « malgré une interdiction de principe de l’alimentation des ruminants à base de farines issues de ruminants, la législation canadienne autorise l’utilisation de certaines protéines, comme les farines de sang et la gélatine ».

Enfin, les tribunaux d’arbitrage prévus par l’accord restent très controversés. Ceux-ci permettent à une entreprise privée d’attaquer un État, si elle s’estime lésée par des réglementations trop vigoureuses.

Pour les adversaires du Ceta cet accord est anti-démocratique, trop favorable aux multinationales, dangereux pour l’agriculture européenne et léger sur l’environnement. Pour l’instant, le gouvernement a tenté d’apporter une garantie en négociant un « veto climatique ».

Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Europe, se félicite d’une « augmentation de 6,5 % des exportations françaises » au Canada, entre 2017 et 2018. Des pics de 10 % ont été atteints, notamment pour les cosmétiques et les produits pharmaceutiques. À l’inverse, les exportations du Canada vers l’UE ont régressé dans le même temps de 3 % et jusqu’à 9 % vers la France.

Dans une étude le Centre d’études prospectives et d’informations internationales relativise l’impact économique du Ceta. Il chiffre les variations dues au traité à 0,5 % pour la majorité des secteurs en France. Les autres effets, notamment sur les émissions de gaz à effets de serre, restent encore flous.

Britney Delsey pour DayNewsWorld