LES ADIEUX  AUX LARMES  D’ALAIN JUPPE

A BORDEAUX  LA BELLE

A la stupeur de beaucoup, et semble-t-il, feinte ou non, de l’intéressé, Alain Juppé vient d’être nommé « Sage parmi les Sages » membre du Conseil Constitutionnel en remplacement de Lionel Jospin.

Le Conseil Constitutionnel comprend 9 membres, plus un membre de droit, Valery Giscard d’Estaing, en sa qualité d’ancien Président de la République. Il est renouvelable par 1/3, le mandat unique d’un membre n’excédant pas 9 ans.

Il fallait en ce début d’année 2019 nommer 3 nouveaux « magistrats » en remplacement de ceux positionnés sur la ligne de départ ou décédé.

Selon la Constitution, le pouvoir de nomination appartient aux :

-      Président de la République qui vient de nommer Jacques Mézard, ancien Secrétaire d’Etat, sénateur

-      Président du Sénat qui vient de nommer Jean Jacques Hyest, sénateur

-      Président de l’Assemblée Nationale qui vient de nommer Alain Juppé

C’est donc dans le cadre de ses attributions que Richard Ferrand a  nommé Alain Juppé.

Cette décision qui a été rendue publique dans la journée du 14 février 2019 a immédiatement donné lieu à des commentaires, le plus souvent acides, à l’exception par exemple de celui de François Baroin, ami de longue date d’Alain Juppé et Président de l’Association des Maires de France.

Le feu d’artifice des critiques a commencé dès le lendemain de l’annonce  avec, la première d’entre elles, que l’on a été obligé de remarquer, à savoir celle de Nicolas Canteloup qui n’a pas hésité à qualifier « ce bug démocratique,  d’accord entre repris de justice ».

Il est vrai qu’Alain Juppé avait fait l’objet d’une condamnation en 2004 dans le cadre de la célèbre affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris alors présidée par Jacques Chirac, mais qu’également Richard Ferrand est aujourd’hui mis en examen dans le cadre d’une sombre affaire d’enrichissement personnel, détournement de fonds et escroquerie au détriment des Mutuelles de Bretagne.

Une affaire chabada chabada (Ferrand/Juppé) le jour de la Saint Valentin !

Il y a eu plus méchant encore !

Alain Juppé craignant de prendre « une branlée » aux prochaines élections municipales de Bordeaux, aurait préféré rejoindre le paradis (proche du Musée Grévin) des politiques, à savoir le Conseil Constitutionnel ou la moyenne d’âge est de 70 ans et plus.

Le Conseil Constitutionnel est il est vrai, au vu de ce constat, en train de devenir un cimetière politique où l’on recase les amis ou ceux que l’on souhaite voir quitter définitivement la vie politique ou encore ceux qui au travers des questions soumises pourraient prendre les décisions attendues par le pouvoir.

Le lendemain, Alain Juppé a aussitôt donné une conférence de Presse, dont l’essentiel, « sanglots dans la voix » s’adressait aux Bordelais à qui il avait pourtant promis de rester jusqu’au bout de son mandat ?

Dans les rangs de l’opposition bordelaise, on a évidemment enfoncé le clou : « les dépense pharaoniques (voir nos précédentes éditions) engagées par Alain Juppé, pour faire de Bordeaux, une belle, ont vidé les caisses ! Alain Juppé ne quitte pas Bordeaux par la grande porte ; il s’est simplement assuré une retraite dorée au Conseil Constitutionnel ». La crise sociale est en effet passée par la ville de Bordeaux où les Gilets Jaunes ont massivement manifesté, les couches populaires ayant été boostées hors la ville par suite des transformations promues par Alain Juppé et son Conseil Municipal. Les Bordelais voient rouge depuis de nombreuses semaines.

Mais le rejet d’Alain Juppé par les Bordelais n’est peut être pas la seule raison de son départ ?

La nouvelle est tombée au moyen d’une déclaration sobre faite par l’intéressé à la Presse le 14 février. Même ses plus proches collaborateurs n’étaient pas, parait-il, dans la confidence. Dans leur très grande majorité les Bordelais n’étaient pas au courant eux aussi.

Pourtant il y avait eu certains signes avant coureurs. Alain Juppé, en rupture depuis de nombreux mois avec les Républicains, depuis l’élection d’Emmanuel Macron, n’avait il pas annoncé au mois de janvier qu’il ne renouvellerait pas son adhésion au parti ? Le rapprochement avec le Président de la République ne s’était il pas concrétisé par la nomination de son ancien protégé, Edouard Philippe à Matignon, tout un symbole !

On dit pourtant en coulisse que la nomination d’Alain Juppé au Conseil Constitutionnel aurait crée des dégâts collatéraux dans la macronie elle-même et dans la macronie de l’Elysée plus précisément, qui, pendant 3 mois  avait manifesté son désaccord vis-à-vis des intentions de Richard Ferrand et qui jusqu’au bout a cherché à le convaincre d’un autre choix, en vain.

Le Président de l’Assemblée Nationale qui voulait « faire un coup » est resté sourd aux recommandations de l’Elysée qui organisait de son coté un jeu de chaises musicales. La nomination d’Alain Juppé a, contrairement aux apparences beaucoup contrarié l’Elysée.

Alain Juppé va donc débarquer rue Montpensier où il va siéger au coté de Laurent Fabius, l’actuel Président du Conseil Constitutionnel, condamné lui aussi dans l’affaire du sang contaminé.

Devenu Sage, Alain Juppé sera désormais tenu à la réserve et ne pourra donc pas soutenir la liste Macron/LREM des prochaines élections européennes, un soutien qui aurait certainement été très utile.

Pourtant les deux hommes avaient déjeuné ensemble le mardi 12 février ?

Malgré tout, battu aux primaires de la droite par François Fillon, Alain Juppé était  resté contre vents et marées une figure de droite.

Par suite, sa nomination au Conseil Constitutionnel va laisser le champ libre à ceux qui entendent reprendre le flambeau du courant de la droite sociale et modérée qu’il représentait, à l’exemple de Valérie Pecresse ou de Xavier Bertrand, lesquels ne reprendront certainement pas le slogan de « l’identité heureuse » qui avait fait refluer une grande partie de l’électorat de droite.

Car,en cette fin de partie, il faut souligner  qu’Alain Juppé avait mis le ver dans le fruit de la droite française qu’il a désintégré de l’intérieur.

Et de ce point de vue, on notera que celui qui a été « le meilleur d’entre nous » est en train de démontrer l’inverse de la formule célèbre d’Edouard Herriot « l’homme intelligent est celui qui mesure qu’il sait comprendre ». En fait, depuis l’aube de sa carrière politique Alain Juppé n’aura rien compris de la France et des Français.

Bon vent donc, Monsieur Juppé au Conseil Constitutionnel !

Clara Mitchell pour DayNewsWorld