ATTAQUES HOUTHIS EN MER ROUGE

 UN PROLONGEMENT DU CONFLIT

 ISRAELO - PALESTINIEN ?

Depuis le début de la guerre le 7 octobre 2023 entre Israël et le Hamas, les Houthis, qui contrôlent une grande partie du Yémen, multiplient les attaques en mer Rouge afin d’y freiner le trafic maritime international, affirmant agir en solidarité avec les Palestiniens de Gaza. Se proclamant solidaires du peuple palestinien, les Houthis ont lancé une série d’attaques contre des navires commerciaux en mer Rouge, dont le Yémen est riverain. 

L’attaque la plus spectaculaire a eu lieu le 19 novembre 2023, lorsque des combattants ont utilisé un hélicoptère pour enlever l’équipage d’un transporteur de voitures lié à un homme d’affaires israélien. L’attention médiatique se portera sur les Houthis qui, fort de leur succès, multiplieront les déclarations : leur porte-parole, Yahya Sarea, publiera de nombreux communiqués sur les réseaux sociaux mettant en garde les puissances « liées à l’entité sioniste » (sic) du risque qu’encourent désormais leurs navires croisant en mer Rouge

Bien que la plupart des attaques des Houthis sur la mer Rouge n’aient pas été couronnées de succès, elles ont forcé des milliers de navires à contourner cette route et à se diriger vers l’Afrique du Sud, ce qui a entraîné des coûts et des délais considérables pour le transport maritime.

Premier allié d’Israël, les Etats-Unis ont mis en place en décembre une coalition internationale pour protéger le trafic maritime, dans cette zone stratégique où transite 12 % du commerce mondial. Regroupés sous la bannière de l’opération « Prosperity Guardian » et sous commandement américain se trouvent le Royaume-Uni, l’Australie, le Canada, la France, l’Italie, la Grèce, les Pays-Bas, la Norvège, l’Espagne, les Seychelles et Bahreïn [38]. 

A l’exception de ce dernier, les pays arabes, ou au moins les pays limitrophes de la mer Rouge comme l’Egypte et l’Arabie saoudite, figurent parmi les grands absents de cette coalition navale, témoignant de la réticence des pays de la région à prendre part à des opérations militaires américaines contre un allié de l’Iran, de surcroît dans le contexte d’affrontements initialement déclenchés en représailles aux opérations israéliennes dans la bande de Gaza .

Saisie de pièces de missiles de fabrication iranienne

L’armée américaine a affirmé mardi avoir saisi des pièces de missiles de fabrication iranienne à destination des rebelles houthis sur un bateau en mer d’Arabie, la première saisie de ce type depuis le début des attaques des Houthis contre des navires commerciaux.

« Il s’agit de la première saisie d’armes conventionnelles avancées (ACW) létales fournies par l’Iran aux Houthis depuis le début des attaques des Houthis contre des navires marchands en novembre 2023 », a déclaré l’état-major de l’armée américaine dans un communiqué.

Cette opération, menée le 11 janvier, a permis de saisir des armes comprenant des « composants de missiles balistiques et de missiles de croisière », a précisé le communiqué.

Les pièces de missiles ont été saisies à bord d’un boutre, un voilier traditionnel arabe, manœuvré par un équipage de 14 personnes. L’embarcation a été coulée, a fait savoir l’état-major de l’armée américaine.

Ce texte indique également que deux militaires de la marine américaine, portés disparus au large des côtes somaliennes depuis jeudi soir, avaient pris part à l’opération. Il s’agit de deux membres des Navy Seals, une force commando d’élite. Des « recherches intensives » sont encore en cours pour les localiser, a indiqué Michael Kurilla, patron du commandement militaire américain pour le Moyen-Orient, l’Asie centrale et du Sud (Centcom).

Les deux marins étaient en mission au sein de la 5e flotte des Etats-Unis qui opère dans une vaste zone incluant le golfe Persique, la mer Rouge, le golfe d’Oman et certaines parties de l’océan Indien. Son quartier général est implanté à Manama au Bahreïn.

"La plus importante attaque " des rebelles déjouée cette nuit

L'armée américaine a annoncé que 18 drones et trois missiles tirés par les Houthis ont été abattus mardi soir, dans le cadre d’une attaque « complexe »

Il s’agit, selon les forces britannique et américaine, de « la plus importante attaque » des Houthis à ce jour. Ce serait aussi la 26e menée par les rebelles yéménites visant le trafic maritime commercial en mer Rouge depuis la mi-janvier.

« Pendant la nuit » de mardi à mercredi, le navire britannique HMS Diamond avec des navires de guerre américains « ont repoussé avec succès (…) les Houthis soutenus par l’Iran », a écrit le ministre Grant Shapps sur le réseau social X (ex-Twitter). L’armée américaine avait quelques heures plus tôt dit que 18 drones et trois missiles tirés par les Houthis avaient été abattus, dans le cadre d’une attaque "complexe".

Plus tôt, le Commandement militaire américain au Moyen-Orient (Centcom) avait indiqué que les Houthis avaient "lancé dans le sud de la mer Rouge une attaque complexe de conception iranienne à l’aide de drones, de missiles de croisière antinavire et d’un missile balistique antinavire".

Le ministre de la Défense britannique a annoncé mardi soir qu’une autre frégate, le HMS Richmond, était en route pour la mer Rouge afin d’y contrer les « attaques » des Houthis. Celle de mardi soir est intervenue alors que le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken se trouve en Israël dans le cadre d’une tournée régionale visant entre autres à empêcher que la guerre entre Israël et le Hamas ne s’étende.

Qui sont les Houthis ?

Les Houthis, également connus sous le nom d’Ansar Allah (ou « partisans de Dieu »), sont un groupe militaire qui exerce actuellement un contrôle de facto sur la majeure partie du nord du Yémen. Formée dans les années 1990, la milice porte le nom de son fondateur, Hussein Badreddin al-Houthi, et suit la branche zaïdite de l’islam chiite, qui représente 20 à 30 % de la population du Yémen. 

Aujourd’hui ils contrôlent certaines parties du nord du Yémen.Le tournant décisif pour le mouvement houthi trouve probablement son origine dans l'invasion américaine de l'Irak en 2003. Inspirés par le succès des combattants du Hezbollah, basés au Liban et qui ont vaillamment affronté les forces occidentales en Irak, les Houthis ont puisé leur inspiration et ont obtenu le soutien du groupe libanais, ainsi que de l'Iran, bien que leurs responsables nient catégoriquement ces liens.

Mais comment les Houthis ont-ils réussi à prendre le pouvoir ? 

Ils figuraient parmi les principaux contestataires du gouvernement central du Yémen dirigé par le président A. Saleh. Face à leur montée en puissance, Saleh a lancé une campagne militaire en 2003, soutenu par l'Arabie saoudite. Malgré la réussite apparente des forces de Saleh, qui ont réussi à éliminer le chef des Houthis, Hussein al-Houthi, en 2004, ces derniers ont infligé à maintes reprises des revers à Saleh et à l'armée saoudienne, malgré les milliards de dollars dépensés par cette dernière.

La guerre civile yéménite, qui a débuté en 2014, a été le théâtre de batailles incessantes entre les Houthis et le gouvernement soutenu par la communauté internationale. Depuis la révolution de 2011, les Houthis ont lutté pour évincer Saleh du pouvoir, formant même une alliance avec lui en 2015. 

Cependant, lorsque cette alliance a volé en éclats, les Houthis ont émergé en tant que puissance dominante, aboutissant à l'assassinat de Saleh en décembre 2017.

Les Houthis ont également joué un rôle majeur dans la guerre civile en cours au Yémen, entraînant environ 377 000 décès, dont de nombreux civils. Bien que le gouvernement du sud soit internationalement reconnu, les Houthis ont conquis une grande partie du nord du pays depuis la prise de Sanaa en 2014. Leur emprise s'étend jusqu'au port stratégique de Hudeidah, source de revenus cruciale générant jusqu'à 1 milliard de dollars pour le gouvernement houthi.

L’accès à la mer Rouge ?

Actuellement, les Houthis, comptant environ 20 000 combattants, sont dirigés principalement par le frère d'al-Houthi, Abdul-Malik al-Houthi. Celui-ci a clairement annoncé qu'il n'hésiterait pas à attaquer les États-Unis et leurs alliés. Depuis le début de la guerre à Gaza en octobre, les Houthis ont tenté d'exploiter le conflit pour démontrer leur puissance et rehausser leur statut international.

En réponse aux multiples attaques en mer Rouge, les États-Unis et le Royaume-Uni ont lancé leur plus grande offensive contre les Houthis depuis 2016. À cette époque, les États-Unis avaient frappé trois sites de missiles houthis en réaction à des attaques contre des navires de guerre américains et des navires commerciaux. Cette action avait temporairement stoppé les attaques houthies. Aujourd'hui, convaincus d'avoir triomphé contre les Saoudiens et l'Occident au Yémen, les rebelles semblent plus déterminés que jamais à défier ouvertement les États-Unis.

"L’efficacité de la coalition navale sous commandement américain et sa capacité à rester dans une posture purement défensive se montreront donc déterminantes tant dans sa réussite que dans le désamorçage d’une potentielle escalade sécuritaire régionale", selon un spécialiste.




Joanne Courbet pour DayNewsWorld