LE SOMMET DE BERLIN SUR LA LIBYE EST

UN PETIT PAS EN AVANT

Le sommet de Berlin, qui a réuni dimanche 19 janvier des délégations de onze Etats et de quatre organisations internationales – Nations unies (ONU), Union européenne (UE), Ligue arabe et Union africaine (UA) –, s’est conclu par l’adoption d’une déclaration commune entrouvrant un espoir d’apaisement.

Le document appelle à un « cessez-le-feu permanent » en Libye, à « s’abstenir de toute ingérence dans le conflit armé » et à relancer le « processus politique » brisé par l’attaque de Tripoli en avril 2019 par le maréchal dissident Khalifa Haftar.

Respecter enfin l'embargo de l'ONU sur les armes, ne plus interférer dans les affaires intérieures de la Libye, c'est ce qu'ont enfin promis les 11 dirigeants participants à la conférence de Berlin. L'important pour Angela Merkel était de parler enfin d'une seule voix pour soutenir la trêve précaire entre les deux forces qui s'opposent en Libye: « Nous avons reçu l'engagement de tous les participants, ils ne fourniront plus aucun soutien à la Libye, et devraient aussi stopper toute opération tant que durera le cessez-le-feu. », a déclaré la chancelière.

Mais c'est bien « un petit pas en avant » pour l’Allemagne, « une conférence très utile » pour la Russie.

« Pour un cessez-le-feu durable »

Fayez al-Sarraj, le chef du Gouvernement d'union nationale reconnu par l'ONU à Tripoli, et son rival qui contrôle l'est libyen, le maréchal Khalifa Haftar, se battent pour prendre le contrôle effectif de ce pays riche en pétrole et en gaz.

Si elles ne se sont pas rencontrées physiquement, les deux têtes d’affiche libyennes présentes à Berlin, Faïez Sarraj, le chef du gouvernement d’« accord national » (GAN) basé à Tripoli, et Khalifa Haftar basé dans la région de Benghazi (est), ils étaient tous deux présents à Berlin.

Le maréchal Haftar a rencontré Emmanuel Macron qui s'inquiète de l'envoi de miliciens syriens pro-turcs et de militaires turcs en soutien à Fayez al-Sarraj que le président turc Recep Tayyip Erdogan a rencontré de son côté.

Un nouveau comité militaire »

Les deux rivaux ont toutefois accepté de former un comité pour travailler, dans les prochains jours à Genève, à établir un cessez-le feu permanent, comme l'a expliqué le chef de la diplomatie russe, Serguei Lavrov :

« Le nouveau comité militaire composé de cinq représentants de Sarraj et Haftar, élaborera, sous la supervision des Nations Unies, des mesures de confiance concrètes qui rendront le cessez-le-feu durable. »

Le conflit qui ravage la Libye

La Libye n'a jamais su trouver une stabilité depuis la mort du général Kadhafi en 2011. Depuis neuf mois, quelque 280 civils et plus de 2000 combattants ont été tués selon l'ONU. Près de 150 000 Libyens ont été contraints de fuir les combats.

Entre la récente arrivée sur le terrain de militaires turcs, la présence soupçonnée de mercenaires russes et l'afflux continu d'armes livrées par plusieurs Etats, la communauté internationale craint de voir le conflit dégénérer dans ce pays plongé dans le chaos depuis 2011.

Aucun responsable politique n'a réussi à prendre le contrôle du pays depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011.

Deux hommes se font la guerre : le maréchal Haftar, le chef de « l'armée nationale libyenne » (ANL) contrôle l'est du pays et une partie du sud de la Libye.

Soutenu par l'Égypte et les alliés de l'Arabie Saoudite, il tente depuis des mois de s'emparer de Tripoli, afin de déloger Fayez al-Sarraj, le Premier ministre reconnu par L'ONU.

Sur le terrain, des heurts entre les deux camps sont signalées presque quotidiennement. Et le camp Haftar a bloqué les exportations de pétrole libyennes, seule véritable source de revenus du pays, à la veille du sommet de Berlin.

Dans ce contexte, Fayez al-Sarraj a demandé à Berlin l'envoi dans son pays d'une « force militaire internationale » sous l'égide de l'ONU.

Plusieurs dirigeants, notamment les chefs de gouvernement italien et britannique, se sont dits ouverts à l'idée de l'envoi d'une mission internationale, voire d'une force, pour aider à garantir un cessez-le-feu.

L'objectif numéro un de ce sommet sous l'égide de l'ONU était de mettre fin aux ingérences étrangères multiples dans cet Etat où les affrontements se nourrissent d'appétits autour de ses importantes réserves de pétrole, de rivalités politiques régionales et de jeux d'influence. Et de relancer le processus de paix pour éviter que la Libye ne devienne une « deuxième Syrie ». Objectif tenu même si des incertitudes demeurent.

« Nous n’avions aucune illusion sur la difficulté de la voie dans laquelle nous nous sommes embarqués », a admis Angela Merkel.

Abby Shelcore pour DayNewsWorld