ATTAQUE TERRORISTE AU LYCEE D'ARRAS

LE PROFIL INQUIETANT DE LA FAMILLE 

DU MEURTRIER MOHAMMED MOGOUCHKOV

Le djihadisme a, une nouvelle fois, frappé la France dans un contexte international de tension extrême. 

Trois ans après l’assassinat de Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), l’école, symbole par excellence de la République, a été à nouveau visée, vendredi 13 octobre au matin, par un islamiste d’une vingtaine d’années.

Un professeur de lettres a été tué et trois autres ont été grièvement blessés lors d'une attaque au couteau en fin de matinée au lycée Gambetta-Carnot d'Arras par un terroriste islamiste. Trois autres personnes ont été blessées par l'assaillant. 

Ce dernier a été placé en garde à vue comme quatre membres de sa famille et trois autres personnes. L'assaillant aurait refusé, pour l'instant, de parler en garde à vue.

L’auteur de l’attaque a par ailleurs crié « Allah Akbar », a fait savoir une source policière. Fiché S, le suspect était sous surveillance de la DGSI et avait été contrôlé jeudi . Si l'assaillant était suivi par les services de renseignement et fiché S depuis le 2 octobre, son grand frère lui a été condamné pour association de malfaiteurs terroristes. 

Il a été condamné à 5 ans de prison pour association de malfaiteurs terroristes auxquels s'ajoutent 18 mois pour apologie du terrorisme .

Un dispositif de secours a rapidement été mis en place autour de la cité scolaire Gambetta-Carnot. Le Raid a été mis en alerte maximale.

Les réactions politiques se sont succédé toute la journée.

Emmanuel Macron a dénoncé un assassinat "lâche et sauvage". Le chef de l'État a d'ailleurs présidé une réunion de sécurité avec plusieurs ministres.

Gabriel Attal a déclaré depuis son ministère que, lundi, "partout en France, nous aurons un moment d'union et de recueillement", en hommage au professeur tué lors d'une attaque au couteau dans un lycée d'Arras.Le ministre de l'Éducation nationale a également annoncé"déployer près de 1.000 personnels de prévention et de sécurité dans les écoles et les établissements scolaires"."Il s'agit des équipes mobiles de sécurité" dans les rectorats.

Premiers témoignages

Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, a raconté le déroulé du drame : " Selon mes informations, deux professeurs qui se trouvaient à l’extérieur de l’établissement ont été agressés par un homme. L’un d’eux a été mortellement touché, l’autre blessé. 

Puis l’assaillant est entré dans le lycée et a agressé une troisième victime. La police est intervenue très rapidement, peut-être en raison du commissariat très proche ou des rondes effectuées. Il a été neutralisé avec un Taser, puis les forces de l’ordre se sont efforcées de retrouver les autres membres de sa famille. Son frère a ainsi été arrêté devant un autre établissement scolaire. "

Un élève de troisième a témoigné auprès du journal, expliquant que le professeur a " essayé de le calmer et de nous protéger ". D’après l’adolescent, le suspect avait « deux couteaux ».

"Plus de 11 ans après les tueries perpétrées par Mohammed Merah, ouvrant de Charlie-Hebdo, au Bataclan jusqu’à Arras une interminable liste de tragédies, c’est au nom de la même idéologie islamiste que des obscurantistes sauvages font couler le sang.", peut on lire dans une tribune.

Le parcours inquiétant du terroriste Mohammed Mogouchkov et de sa famille

Une expulsion collective avortée in extremis, un père de famille renvoyé en Russie, une mère déboutée de l’asile, un fils emprisonné dans le cadre d’un projet d’attentat, un second qui a commis vendredi un attentat islamiste : chronique de quinze années en France pour les Mogouchkov. La famille de Mohammed Mogouchkov, qui a poignardé vendredi un enseignant dans un collège-lycée d’Arras, est arrivée en France en 2008, selon une source policière.

Le parcours de l'assaillant commence à se dessiner. Mais le jeune homme, qui a été interpellé par les forces de l'ordre, n'était pas le seul de sa famille à être connu des services de renseignement.

Le suspect, un jeune homme de 20 ans, présenté comme tchétchène et né en Russie, a crié "Allah Akbar" avant de commettre le meurtre de l'enseignant. Originaire d'Ingouchie, il avait été élève dans l'établissement où l'attaque a eu lieu. Depuis l'été dernier, il était sous la surveillance de la DGSI et avait été inscrit au Fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT). Plus tard, il a été classé comme individu radicalisé le 2 octobre.

Surveillé par les services de renseignement

Arrivé en France en 2008 à l'âge de 6 ans, il n'a jamais obtenu la nationalité française. En mars 2021, sa demande d'asile avait été rejetée par l'Ofpra, suivi d'un rejet de son recours en août 2022. Cependant, du fait de sa présence en France avant l'âge de 13 ans, il bénéficiait d'une protection contre l'éloignement du territoire français.

Les services de renseignement le surveillaient depuis environ dix jours, utilisant des écoutes téléphoniques et des surveillances physiques. Jeudi, il avait été contrôlé sans qu'aucune infraction ne puisse lui être reprochée, avant d'être relâché. Les premières investigations suggèrent qu'il s'agit d'un individu radicalisé ayant subitement décidé de passer à l'acte. Son jeune frère a également été interpellé près d'un autre lycée d'Arras.

Le grand frère déjà condamné

Le grand frère est également connu des services de renseignement et a été condamné cette année à cinq ans de prison ferme pour "association de malfaiteurs terroristes" et à 18 mois pour "apologie du terrorisme". Il est actuellement détenu à la prison de la Santé à Paris.

En 2019, la DGSI avait repéré un homme suspecté de préparer un attentat. L'enquête avait révélé que ce projet impliquait un trio visant à attaquer les abords du palais de l'Élysée et les forces de l'ordre ainsi que des civils sur l'avenue des Champs-Élysées. L'un des suspects avait des liens via Telegram avec le grand frère de l'assaillant d'Arras, décrit comme un "jeune radicalisé particulièrement violent sur les réseaux sociaux". 

Cela avait conduit à l'arrestation des membres du trio au moment où ils s'apprêtaient à se procurer des armes. En outre, l'enquête avait révélé que le grand frère avait été impliqué dans des activités de propagande et avait des intentions de départ pour en Syrie pour le djihad.

Et ce n'est pas tout. Lors de l'instruction, les policiers avaient découvert l'existence d'un incident au sein du lycée Gambetta d'Arras, début décembre 2016. A l'occasion d'un cours consacré à la liberté d'expression et spécifiquement aux attentats de Charlie-Hebdo, il avait déclaré "que l'attentat avait eu lieu car ils avaient insulté les musulmans. 

Ils ont insulté l'Islam en représentant le prophète et les chiites ne sont pas des musulmans". Sur les réseaux sociaux, il avait proposé à une interlocutrice "des cours d'égorgement en théorie et en pratique".

Un avis d'expulsion en 2014 En 2016, il avait proféré des propos alarmants au sein du lycée Gambetta d'Arras.
En 2013, la famille avait soumis une première demande d'asile en France, qui avait été rejetée. En 2014, une tentative d'expulsion avait été engagée, annulée ensuite à cause de la mobilisation d'associations.

Les organisations de défense des étrangers multiplient les actions pour l’empêcher. Dans un communiqué du 19 février 2014, l’antenne rennaise du Parti communiste français (PCF) se félicite de la « mobilisation des associations qui a su faire reculer la préfecture […] et libérer la famille Mogouchkov » du centre de rétention où elle avait été placée pour cette opération « en catimini ».

Ce vendredi, une enquête a été ouverte par le parquet national antiterroriste (Pnat) pour des chefs d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste, de tentative d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste et d'association de malfaiteurs terroriste en vue de préparer des crimes d’atteinte aux personnes. Les investigations sont menées par la sous-direction antiterroriste de la direction nationale de la police judiciaire (SDAT), la direction nationale de la police judiciaire (DNPJ) et la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

De l'émotion et de la colère

"Cette société fabrique de l'amnésie en permanence… 

On oublie tout très vite : entre deux attentats, entre deux profs assassinés, on fait comme si tout allait bien ! 

Qu'est-ce qu'on va faire maintenant ? 

On va aller déposer des ours en peluche et des bougies ? 

C'est cela qui empêchera le prochain attentat ? 

Beaucoup n'ont toujours pas compris à qui on a affaire, notamment parce que cette société est incapable de se décentrer mais aussi par paresse intellectuelle et fuite de la réalité. 

Oui, celle-ci fait peur et il va bien falloir l'affronter.", assène le professeur d'histoire Iannis Roder, enseignant en Seine-Saint-Denis et directeur de l'Observatoire de l'éducation de la Fondation Jean Jaurès dans Le Point.

Cet attentat rappelle une fois de plus que notre démocratie malgré les lois successives et l’efficacité croissante des services de police, s’est montrée incapable à ce jour d’éradiquer le mal.




Alyson Braxton pour DayNewsWorld