LE SPECTRE D'UNE INCULPATION PENALE POUR DONALD TRUMP S'ELOIGNERAIT

Nouveau coup de théâtre à New York : la justice a repoussé, peut-être jusqu'à la semaine prochaine, l'éventuelle inculpation pénale de l'ancien président des États-Unis Donald Trump, rapportent mercredi 22 mars plusieurs médias.

Samedi dernier, l'ancien chef d'Etat et candidat à la présidentielle de 2024 a prédit sa propre arrestation, prévue selon lui ce mardi 21 mars. Il est inquiété pour avoir acheté le silence de Stormy Daniels (de son vrai nom Stephanie Clifford), une actrice de films pornographiques avec laquelle il aurait eu une liaison.

«Le candidat du parti républicain» à la primaire pour la présidentielle de 2024 «et ancien président des Etats-Unis d'Amérique va être arrêté mardi de la semaine prochaine», a écrit Donald Trump samedi, sur la plate-forme Truth Social. Appelant à des manifestations, il a encouragé ses sympathisants à «reprendre [la] nation», alors qu'il est dans le viseur de la justice de l'Etat de New York. S’il n’a pas été arrêté mardi, il pourrait l’être dans les prochains jours.

Peur que "Melania le largue".

Le milliardaire républicain de 76 ans, qui rêve de "regagner" la Maison Blanche en novembre 2024, doit répondre devant la justice de l'État de New York d'une affaire de paiement de 130 000 dollars, juste avant sa victoire à la présidentielle de novembre 2016, à une actrice de films X, Stormy Daniels, avec qui il aurait eu une liaison.

Selon le Daily Mail, Donald Trump a payé Stormy Daniels pour empêcher sa femme de découvrir les détails de ses accusations d'infidélité.

D'ailleurs Melania Trump, furieuse, a passé plusieurs nuits dans un hôtel huppé de Washington pour se tenir à l'écart de la Maison Blanche lorsque la nouvelle a éclaté que le président de l'époque avait payé la star du porno pour qu'elle garde le silence sur leur aventure d'un soir, a été rapporté par le Wall Street Journal en janvier 2018. C'était exactement ce que Donald Trump craignait. Il avait peur que "Melania le largue".

Donald Trump nie donc tout acte répréhensible et toute liaison avec Mme Daniels, 44 ans, et a qualifié l'affaire de politiquement motivée. Il a décrit le paiement à Mme Daniels comme un "paiement de nuisance" que les gens riches paient parfois pour faire disparaître un problème.

Après l'article, un magazine people a publié une interview de Daniels datant de 2011, dans laquelle elle parlait de la relation sexuelle de 2006 avec le futur président dans une chambre d'hôtel d'un casino de Lake Tahoe, au Nevada, à la suite d'un tournoi de golf de bienfaisance organisé par des célébrités. Le magazine avait conservé l'interview pendant sept ans avant de la publier.

L'affaire remonte à la campagne présidentielle de 2016.

A l'époque, les proches de Donald Trump tentaient d'empêcher toute révélation embarrassante sur le candidat républicain, quitte à y mettre le prix. L'un de ses amis, patron du tabloïd The National Enquirer, a par exemple acheté pour 150.000 dollars les droits de l'histoire du mannequin Karen McDougal, qui affirme avoir eu une relation avec le milliardaire.

A la même période, Stephanie Clifford, plus connue sous son pseudonyme d'actrice Stormy Daniels, a elle aussi tenté de monnayer son aventure supposée avec Donald Trump. Affirmant avoir eu une relation avec lui en 2006, alors qu'il était déjà marié à sa femme Melania, elle a été mise en relation avec Michael Cohen, l'avocat personnel du candidat républicain.

Fin octobre 2016, celui que l'on surnomme «le pitbull» a fait signer à l'actrice un accord de confidentialité, en échange de 130.000 dollars. Ce paiement a été révélé en janvier 2018 par le Wall Street Journal mais Michael Cohen et Donald Trump ont nié, ce dernier assurant même n'avoir jamais eu de relation avec Stormy Daniels.

Alvin Bragg sous le feu des projecteurs

Après des années d'enquête par le parquet de Manhattan, son procureur Alvin Bragg, un élu démocrate, semblait le 13 mars dernier tout près d'annoncer une inculpation au pénal – qui serait historique – du 45e président américain (2017-2021).

Mercredi matin, des médias américains, qui font le siège du palais de justice de Manhattan, spéculaient sur l'hypothèse qu'un grand jury – un panel de citoyens aux larges pouvoirs d'enquête qui travaille avec le procureur Bragg – vote une inculpation dans l'après-midi. Michael Cohen, ancien avocat et désormais ennemi de Trump ayant payé Stormy Daniels, avait témoigné devant le grand jury. L'actrice a aussi coopéré avec les procureurs et ce même panel.

Interrogée une porte-parole du procureur a refusé de "confirmer ou de commenter les questions liées au grand jury".

Et même inculpé, Donald Trump ne serait pas "arrêté" dans l'immédiat. Il faudrait attendre plusieurs jours pour qu'il comparaisse à Manhattan. Dans ce cas, après s'être volontairement "rendu" à la justice, il se ferait signifier les poursuites et serait, éventuellement et symboliquement, placé quelques minutes en état d'arrestation.

L'ancien président, qui a bouleversé l'équilibre des pouvoirs aux États-Unis depuis 2016, serait alors photographié, ses empreintes digitales relevées et il pourrait même être brièvement menotté.

Une affaire juridiquement complexe

L'affaire de l'actrice pornographique Stormy Daniels est juridiquement complexe. La justice new-yorkaise cherche à déterminer si Donald Trump est coupable de fausses déclarations, une infraction, ou de manquement aux lois sur le financement électoral, un délit pénal, en ayant versé de l'argent à cette femme, de son vrai nom Stephanie Clifford, juste avant la présidentielle de 2016, que le républicain avait remportée .

Dans le viseur de l'enquête sur les ingérences de la Russie dans la présidentielle de 2016, Michael Cohen a fini par collaborer avec la justice. Il a plaidé coupable en août 2018 pour fraudes fiscales, bancaires et violation des lois sur le financement des campagnes électorales.

Ce faisant, «le pitbull» s'est retourné contre Donald Trump, affirmant avoir toujours agi sur ses ordres. Or, le parquet fédéral a estimé que les paiements réalisés par l'avocat pour acheter le silence de l'actrice visaient à «influencer l'élection présidentielle de 2016». Michael Cohen a été condamné à trois ans de prison en décembre 2018.

L'enquête a montré que la Trump Organization a remboursé à Michael Cohen les sommes versées à Stormy Daniels. C'est là que le bât blesse : la justice américaine considère qu'il s'agit d'un don dissimulé à la campagne du président, en violation des lois de financement électoral.

Le fait d'avoir payé Stormy Daniels pour acheter son silence n'est pas criminel en soi. Mais, comme l'explique John Coffee, professeur de droit à l'université de Columbia et spécialiste de la criminalité financière, «ce qui est illégal, c'est de falsifier les documents commerciaux d'une entreprise».

Les remboursements versés à Michael Cohen par la Trump Organization ont en effet été «déclarés comme étant destinés à couvrir des frais juridiques». Ce que la justice américaine considère comme des fausses déclarations.

Face à la justice locale de l'Etat de New York, cette seule infraction constitue un délit. Mais «si les procureurs peuvent convaincre un jury que la falsification a eu lieu dans le but de cacher un autre crime», comme un don illégal à la campagne du candidat de 2016, «cela devient un crime, qui peut être puni jusqu'à quatre ans de prison», affirme John Coffee.

Même s'il est condamné devant la justice new-yorkaise, Donald Trump ne sera pas légalement empêché de maintenir sa candidature à la présidence des Etats-Unis pour 2024.Le Républicain fera tout pour retarder un procès, afin d'éviter l'effet potentiellement «stigmatisant» d'une condamnation.

La défense de Donald Trump

S'il est mis en examen, Donald Trump risque d'être jugé sous l'égide du parquet du procureur de l'Etat de New York pour Manhattan, Alvin Bragg, un élu démocrate. Or, dans chacune des affaires qui le visent, le Républicain dénonce «une chasse aux sorcières» politique menée par des magistrats démocrates.

Ses avocats le disent victime d'une «extorsion» de la part de Stormy Daniels et mettent en doute la fiabilité de Michael Cohen, devenu le témoin clé de l'accusation et donc l'ennemi juré de Donald Trump. Pour fragiliser son témoignage, la défense insiste sur le fait que l'ancien avocat, désormais radié du barreau, avait été condamné pour avoir menti au Congrès dans l'enquête sur l'ingérence russe.

« Un procureur radical de New York qui essaie de faire tomber Trump avant 2024 ? Il fallait s’y attendre », s’est moquée Laura Ingraham dans les premières minutes de son émission du lundi 20 mars. La journaliste vedette de Fox News a ensuite intronisé le procureur en question, Alvin Bragg, au « Panthéon des détracteurs de Trump », estimant que ce dernier considère cette histoire de pots-de-vin comme une priorité plus importante que les « criminels violents ».

L'animateur Jesse Watters a affirmé qu’Alvin Bragg tentait de « déclencher un nouveau 6 janvier », date de l’assaut du Capitole des États-Unis, en s'en prenant à Donald Trump :

 "Ils n'ont pas intérêt à mettre mon président en prison. Il représente 74 millions d'Américains.

C’est autant de votes que vous voulez mettre sous les verrous. En tout cas, c'est ainsi que je vois les choses".




Garett Skyport pour DayNewsWorld