LE GOUVERNEMENT BORNE OU L'APPEL DU PIED

 A LA GAUCHE MELANCHONNISTE

C’est un gouvernement marqué par la continuité, mais plus cyniquement marqué à gauche, qu’a annoncé, hier après-midi, Alexis Kohler, le secrétaire général de l’Élysée. Si le premier gouvernement d’Élisabeth Borne accueille 13 nouvelles recrues sur les 27 ministres, ministres délégués et secrétaires d’État nommés hier, la très grande majorité des postes clés a en effet été confié e à des piliers du dernier quinquennat.

Certes, les nominations au Quai d’Orsay de Catherine Colonna et à la Culture de Rima Abdul Malak, pourrait constituer une nouveauté mais en fait elles n'ont rien d’extraordinaire : la première, diplomate chevronnée, a déjà été deux fois ministre sous Jacques Chirac et la seconde était jusque-là la conseillère culture d’Emmanuel Macron.

De plus la très grande majorité des postes les plus importants ont été confiés à des ministres déjà en place ou à des politiques expérimentés. En effet, pour mener à bien la planification écologique, la locataire de Matignon s’est entourée de deux visages connus du gouvernement Castex. Amélie de Montchalin – ex-Fonction publique – qui sera en charge de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et Agnès Pannier-Runacher (ex-Industrie) qui pilotera la Transition énergétique.

Quant aux autres ministères régaliens, excepté les Affaires étrangères donc, là encore, Élisabeth Borne a fait confiance aux «anciens» du dernier quinquennat. Ainsi, Bruno Le Maire a été reconduit à la tête de Bercy en tant que ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique. Celui qui a mis en place «le quoi qu’il en coûte» au plus fort de la pandémie, puis le plan de relance et qui avait l’appui des patrons et le soutien de Bruxelles confirme son rôle clé dans la macronie. Il est désormais le numéro 2 du gouvernement. En numéro3, un autre incontournable du dernier quinquennat l’ancien sarkozyste Gérald Darmanin reste en effet à l’Intérieur. Damien Abad, l’ex-patron des députés LR à l’Assemblée, constitue la dernière prise de guerre. Le député de l’Ain hérite du ministère des Solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées. Pourtant donné partant, Éric Dupond-Moretti conserve lui aussi ses fonctions à la Justice, malgré sa mise en examen. Enfin, Sébastien Lecornu, l’ex-ministre des Outre-mer, a été promu aux Armées, à la place de Florence Parly.

Par ailleurs, Olivier Véran laisse, lui, la Santé à Brigitte Bourguignon (ex-secrétaire d’État en charge de l’autonomie) et prend le ministère des Relations avec le Parlement. Quant à Gabriel Attal, il a été nommé aux Comptes publics. Et c’est Olivia Grégoire, (ex-secrétaire d’État à l’Économie sociale et solidaire), qui le remplace comme porte-parole du gouvernement. Proche d’Emmanuel Macron, Clément Beaune reste à l’Europe.

Vers la gauche de Mélanchon

Ce nouveau gouvernement doit aussi se lire à travers ses équilibres politiques.

Élisabeth Borne, par son parcours, doit marquer une inflexion à gauche. Le Modem Marc Fesneau, l’ex-ministre des Relations avec le Parlement, passe à l’Agriculture. Olivier Dussopt, le patron de Territoires de progrès, l’aile gauche de la Macronie, est nommé ministre du Travail. Il était auparavant en charge du Budget. Quant à Franck Riester, le président d’Agir, il reste au Commerce extérieur. Christophe Béchu, le maire d’Angers et numéro2 d’Horizons – le parti d’Édouard Philippe –, a été nommé ministre délégué en charge des collectivités territoriales.

Des places reviennent également à des marcheurs du premier jour. Le patron du parti Stanislas Guerini a été nommé ministre de la Transformation et de la fonction publiques, la présidente de la Commission des Lois à l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, est promue aux Outre-mers. Amélie Oudéa-Castera, l’ancienne patronne de la Fédération de tennis, accède, elle, au ministère des Sports.

Le plus grand tournant à gauche s'incarne du côté de l’Education Nationale dans le remplacement de Jean-Michel Blanquer, tenant d’une ligne laïque stricte, par l’historien Pap Ndiaye, « « à qui l’on reproche d’appartenir à la pensée «  décoloniale », et d’avoir déclaré il y a quelques années dans une interview au Monde, qu’« il existe bien un racisme structurel en France ».

Pour la droite, cette nomination est avant tout un signal à une frange de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon… », analyse Anita Hausser, journaliste, dans son éditorial Cynisme électoral et déconstruction au gouvernement à Atlantico.




Garett Skyport pour DayNewsWorld