PANDEMIE GILETS JAUNES

 « ON REVIT DES TEMPS TRES MOYENAGEUX »

SELON EMMANUEL MACRON

Dans un entretien à la revue Zadig, le chef de l'État s'épanche sur la crise sanitaire vécue par tous depuis un an et demi et comparable, selon lui, à la période du Moyen-Âge. À un an de l'élection présidentielle, Emmanuel Macron se dit « très confiant » pour l'avenir.

Si un an et demi après son apparition, l'épidémie n'est toujours pas résorbée, la vaccination donne une lueur d'espoir et permet aux responsables politiques de tirer des premières leçons. Dans un entretien accordé à la revue Zadig, le président s'est livré lui aussi sur cette épidémie et ses conséquences sur la société française. « Cette pandémie est la métaphore de notre époque.

On revit des temps au fond très moyenâgeux : les grandes jacqueries, les grandes épidémies, les grandes peurs... », considère ainsi Emmanuel Macron, allant plus loin : « C'est l'époque des grandes peurs, de phénomènes qui forgent un peuple, je dirais même de la réinvention d'une civilisation. C'est aussi un moment de tensions qui travaillent le pays ».

Avec les « gilets jaunes », « on a redécouvert la violence

Parlant de retour à une époque moyenâgeuse, le président fait également allusion à la crise des Gilets jaunes, ayant précédé celle du Covid et ayant donné lieu à des manifestations pendant plusieurs mois sur les ronds-points et dans les grandes villes de France. Selon lui, le mouvement social a marqué « un retour de la violence dans la société », « un des fondamentaux de notre vieux pays, fait de jacqueries ».« On a redécouvert la violence. La violence politique et militante existait depuis plusieurs années dans notre démocratie, avec le retour des black blocks dans les manifestations européennes puis en France en 2016. Avec les 'gilets jaunes', il s’agit d’un retour de la violence dans la société. On retrouve un des fondamentaux de notre d’un retour de la violence dans la société. On retrouve un des fondamentaux de notre vieux pays, fait de jacqueries. » Si aucun politique n'a été capable d'anticiper la formation de ce mouvement protestataire, qui durera près d'un an, Emmanuel Macron explique ne pas avoir « été surpris de ce qui arrivait », voyant dans les Français « un peuple très résistant » mais qui « s'embrase sur le coup de colères ».

La France n'est pas « une addition de minorités ou de ressentiments ».

« La France, c’est une volonté de chaque jour, ce n’est pas une identité figée », affirme Emmanuel Macron à propos des « immigration africaines ». « Il faut dire à ces hommes et à ces femmes : vous qui êtes là par les cruautés de l’histoire, par la volonté de vos grands-parents, de vos parents ou par la vôtre propre, vous êtes une chance pour notre pays ». En Seine-Saint-Denis, « il ne manque que la mer pour faire la Californie ». Et de vanter les mérites du 93 : « Je vais vous décrire, en vous demandant de fermer les yeux, le département le plus jeune de France, avec deux aéroports internationaux, le plus important stade sportif français et le plus grand nombre de créations de start-up par habitant. Il ne manque que la mer pour faire la Californie… », assure le président de la République. D'après lui, la Seine-Saint-Denis est à la fois « un poumon », « un espace unique de transformation économique et sociale » est un département où « toutes les fragilités françaises sont concentrées ». C’est notamment « le seul endroit où l’on a assumé d’être un pays d’immigration, qui intègre, qui élève les enfants nés ici comme ailleurs ».« Notre pays a besoin, pour vivre sereinement, de bâtir un récit commun et de poser des actes reconnaissant toutes ces vies, toutes ces mémoires », assure le président de la République.

La réforme de l'ENA est également évoquée, le chef de l'État la défendant coûte que coûte : « La maladie de la France n'est pas la bureaucratie ni le centralisme mais les corporatismes. C'est-à-dire des intérêts qui protègent l'entre-soi. L'ENA a permis aux corporatismes de se reconstituer ».Il est nécessaire, selon lui, de « sélectionner différemment » pour la haute fonction publique car "quand on vient d'un milieu populaire, et plus encore quand on est issu de l'immigration, il faut cinq à six générations pour accéder ne serait-ce qu'au milieu de l'échelle sociale. C'est énorme et, pour tout dire, décourageant ». Une ordonnance doit venir entériner la réforme ce mercredi 26 mai, remplaçant l'école prestigieuse d'administration par l’Institut du service public (ISP) au 1er janvier 2022 tout en donnant des garanties d'indépendance aux hauts fonctionnaires sortants.

Emmanuel Macron souligne aussi l'urgence de répondre au sentiment de « décrochage » d'une partie de la population qui exprime « la même inquiétude de la désindustrialisation, d'un sentiment d'injustice, d'une impression de trahison démocratique ».

Dans ce long entretien de vingt pages , consacré à « sa vision de la France » et au « rapport charnel » qu'il entretient avec le pays, le chef de l'État assure avoir confiance envers l'avenir et la capacité de se relever après une crise sanitaire et sociale de cette ampleur. « Si on a une énergie collective et une vision, on repartira de l'avant. Je pense que nous en avons la possibilité », estime-t-il, évoquant « la capacité à embrasser le futur, à se projeter (...) alors déterminante pour le rebond que prend le pays ». À un an de la présidentielle, Emmanuel Macron affiche donc un certain optimisme, disant avoir « la prescience que nous avons cette force et cette inspiration en nous » et croire « beaucoup dans l'inspiration du peuple français ».

Il assure que son rôle « est, chaque fois, de tracer le bon chemin, d’y mettre le bon mot, même si je fais des erreurs, pour permettre que cela advienne ».




Joanne Courbet pour DayNewsWorld