DE GRAVES DYSFONCTIONNEMENTS AU STADE DE FRANCE OU LE DENI DU GOUVERNEMENT MACRON

Comment expliquer la soirée cauchemardesque du stade Saint- Denis samedi 28 mai 2022 ? 

La faute aux supporters britanniques et aux faux billets a maintenu le ministre de l’Intérieur Gérard Darmanin, devant la commission d'audition du Sénat. Dans un rapport au ministre de l'Intérieur, Didier Lallement aboie dans le même sens que son maître  annonçant saisir le procureur de la République pour « fraude massive aux faux billets ». 

Selon lui, entre « 30 000 et 40 000 personnes » se sont présentées au Stade de France sans billet ou avec de faux billets, alors que l'enceinte ne peut accueillir que 80 000 personnes. La préfecture de police de Paris assure que les tentatives d'intrusion ou d'utilisation de faux billets étaient « globalement » le fait de « supporters anglais ».

C 'est le tollé et l'indignation de l'autre côté de la Manche. « Stade de Farce », titre en français le journal britannique The Sun , qui ne décolère pas. Des officiers de police, présents comme observateurs britanniques, étaient les premiers à s'étonner de cette communication de la part des autorités françaises. « L'immense majorité des supporters anglais se sont comportés d'une manière exemplaire, arrivant tôt aux tourniquets et faisant la queue ». Le président du club de Liverpool, Tom Werner, a écrit à la ministre des Sports : « Vos commentaires sont irresponsables, non professionnels et totalement irrespectueux. […] Ces fans étaient traités comme du bétail […] et agressés par des gangs. ». 

Le club de Liverpool a immédiatement réclamé l’ouverture d’une enquête « pour déterminer les causes de ces problèmes inacceptables ». Dimanche, la secrétaire d’État britannique aux Sports, Nadine Dorries, a demandé « à l’UEFA de lancer une enquête officielle pour savoir ce qui s’est mal passé et pourquoi, en coopération avec le personnel du stade, la police française, la Fédération française de football, la police du Merseyside [la région de Liverpool] et le Liverpool FC ». Des excuses sont demandées. Alors que s'est-il réellement passé ?

Des faux billets ? « Il y avait des faux billets et des fausses accréditations, on en a vu, mais de manière très marginale », décrit Pierre Barthélemy, avocat de plusieurs groupes de supporters français, présent à Saint-Denis dans le Parisien. Ronan Evain, directeur général de l'association Football Supporters Europe, ajoute sur France Inter que les fraudeurs étaient « majoritairement des jeunes Parisiens qui sont venus tenter leur chance au tour du Stade de France »

Contrairement à ce qu’a avancé le ministre de l’Intérieur, les supporters anglais aux abords du stade n’étaient pas des hooligans anglo-saxons porteurs de faux billets. Nulle volonté de casser ou de provoquer des affrontements chez les fans anglais venus au stade de France, contrairement aux actions habituelles des hooligans.

Mais c'est une horde de jeunes délinquants des quartiers qui a été en grande partie responsables de la pagaille qui s’est créée au Stade de France. On évoque le nombre de 300 à 400 jeunes qui ont pillé des effets personnels et des billets pour le match. Ces jeunes ont également commis des violences physiques envers les supporters présents pour rentrer dans le stade. «On a des voyous sans-papiers et des voyous de cité qui sont venus opportunément détrousser majoritairement des spectateurs espagnols et anglais en leur volant des effets personnels, téléphones portables et portefeuilles et il y a eu beaucoup de vols dans des véhicules stationnés aux alentours du Stade de France», a rapporté Matthieu Valet, porte-parole du syndicat indépendant des commissaires de police à CNEWS.

Par ailleurs, Jérôme Jimenez, porte-parole Ile-de-France UNSA Police, a indiqué la présence majoritaire de «personnes connues des services de police» et beaucoup de «mineurs». Au total, 105 interpellations et 48 gardes à vue ont été opérées à la suite des incidents.2 Britanniques seulement parmi eux !! Motifs de leur interpellation : vol avec arme, vol avec violences, recel, violences sur personnes dépositaires de l'autorité publique, violences en réunion, dégradations, tentative d'intrusion dans le stade, vol à la roulotte.

 Les jeunes émeutiers venus pour provoquer, semer le trouble, pour voler, confirment ainsi la « théorie des opportunités ». N’y a-t-il pas fréquemment aux abords des grands événements sportifs des pickpockets et des vols ?

De plus la Seine-Saint-Denis, département, dont de nombreuses villes font partie du dispositif « quartier de reconquête républicaine », présente les taux de criminalité les plus élevés de France, avec près de 145 000 crimes et délits enregistrés en 2017 alors comment s'étonner de cette délinquance ?

À quelques jours des élections législatives, la déclaration du ministre semble donc avant tout très politique. Pas une seule autorité française ne s'avère capable d'assumer l'organisation désastreuse et pas une voix officielle pour blâmer les délinquants que la Seine-Saint-Denis de peur de déplaire à certains...mais au prix d'un mensonge éhonté qui ne fait que décrédibiliser la parole politique.

Mais une meilleure organisation aurait-elle permis d'éviter ce « carnage » ? 

Oui sans aucun doute. Le stade de France, c’est un presque la moitié de la population de la ville de Rennes ou du XIXe arrondissement parisien. C’est une ville et ses habitants qui doivent s’installer en moins d’une heure dans le stade après avoir été partiellement fouillés, palpés, filtrés, répartis.

La première erreur réside déjà dans le fait d'avoir accepter des billets en papier, en partie du moins. C’est déjà accepter que la fraude puisse s’organiser tant les imprimantes et logiciels sont aujourd’hui capables de reproduire et créer n’importe quoi. Ceci n’a pu que retarder l’entrée et créer des situations ubuesques dans lesquelles bousculades, impatiences, vociférations et provocations ont pris forme avant d’être réprimées.

A cela s'ajoute à n’en point douter des choix d’intervention tout à fait contestables, au regard des publics qui s’agglutinaient et s’impatientaient. Nul hooligan, mais des supporters, énervés certes de ne pouvoir entrer dans le stade, mais aussi des femmes, des familles, des gens de tous âges. À ces facteurs viennent s’ajouter les grèves de transports non anticipées par les organisateurs et le gouvernement qui auraient pu prévoir des moyens de substitution.

Ces incidents, à condition d’en reconnaître chacun sa responsabilité, constituent un avertissement de ce qui doit être pensé, réfléchi et mis en œuvre dans un an (Coupe du Monde de rugby) ou deux ans (JO 2024).




Alize Marion pour DayNewsWorld